Roger Teillet est né
le 25 janvier 1914 à Périgueux, en Dordogne. Engagé
en 1935 au titre de la Base Aérienne de Rabat, le Caporal Teillet
est admis comme élève pilote le 3 juin 1936. Breveté
4 mois plus tard, il est promu Sergent et affecté le 9 mars
1937 à la 1ere Escadrille du GC I/1
qui est encore équipée le 3 septembre 1939 de ses vieux
Dewoitine 510. Le Groupe se transforme sur Bloch MB 152 à moteur
14 N-25 en octobre 1939. Au cours d'une campagne de tir réalisée
au cours de l'hiver, Teillet se révèle être l'un
des plus mauvais tireur du Groupe, image qu'il ne tardera pas à
contredire au combat. Le 1 avril 1940, il est promu Sergent-Chef,
alors qu'à la même époque le Groupe échange
ses MB 152 à moteur 14 N-25 contre des appareils à moteur
N-49 plus puissants.
CAMPAGNE
DE FRANCE
12 mai 1940. Le GC I/1 a détaché
la plupart de ses avions à Couvron, près de Laon, de
façon à pouvoir opérer au-dessus de la Belgique.
Couverture Namur - Wavre - Tirlemont - Hannut, entre 18 h3 0 et 19
h 00, par une patrouille triple. Un Do 215 est probablement abattu
par quatre pilotes (voir récit du combat de Germain
Coutaud). Bien que cette victoire figure sur le carnet de vol
de Teillet, qui participait à
la mission avec le Bloch 152 n°571, elle ne lui est pas accordée
officiellement.
15 mai 1940
|
Le GC I/1 détache trois
patrouilles de la 1ere Escadrille à Couvron. Couverture
Marienbourg - Philippeville - Florennes - Fosse dans la matinée,
une patrouille triple à 2 500 m qui attaque un Dornier
l7 vers Namur à 10 h 05. : "La patrouille rejoint
le Do 17 et se place pour prononcer une attaque avec le soleil
dans le dos. Pendant un moment le Do l7 cherche à fuir
en prenant de l'altitude, mais se sentant rejoint et tiré
par le Capitaine Coutaud (MB
152 n°568), pique jusqu'au sol et tente de rentrer dans
ses lignes en rase-motte. L'Escadrille entière le poursuit
et après 5 minutes de combat, son moteur droit prend
feu ; puis le Do 17 appartenant à la 4.(F)/14
tombe et s'écrase dans un bois d'où s'échappe
une fumée. Position approximative : Namur 695, heure
: 11 h 15" Homologué au Capitaine Coutaud,
au Sergent-Chef Coader, au Sergent-Chef
Teillet (MB 152 n° 571
touché par le mitrailleur adverse) et au Caporal Pipa.
Protection d'une formation de bombardiers LeO 451 des GB
II/12 et GB I/31 sur Monthermé,
décollage de Couvron 18 h 30, une patrouille triple
(plus une de MS 406 des GC III/3
et GC II/6 et une autre de MB 152
du GC I/8). Au retour les Bloch
du GC I/1 attaquent par I'arrière
un Do 215 (En fait un Do 17Z du 5./KG
3) qui est laissé en feu entre Mézières
et Sedan. Victoire seulement probable pour les pilotes suivants
: Capitaine Coutaud (MB 152
n° 385), Sergent-Chef Teillet
(MB 152 n° 571), Coader,
Fiala et Tain,
Caporal Pipa.
|
17 mai 1940
|
Couverture Fourmies - Trelon - Avesnes, décollage
à 11 h 30, une patrouille triple. Parvenues à
4 000 m, aux environs de Sains - Richemont - Guise, les deux
patrouilles basses sont prises à partie par la chasse
allemande. Le dispositif obtient trois victoires dont un Me
109 de la I./JG 3 à 12 h 10
près de Saint-Quentin par le Sergent-Chef Teillet
(MB 152 n° 571), qui a écrit : " Ronde de
tous les Boch qui cherchent à se reformer. Le St-ch Teillet
aperçoit 4 avions qui tournent dans la direction de La
Fère. En s'approchant reconnaît des Me 109. Engage
un combat tournoyant avec 1 isolé et l'abat en flammes
à Sérè lès Mézières.
Pilote saute en parachute. Bl tiré par troupes ennemies..
".
|
18 mai 1940
|
Couverture Compiègne - Cambrai - forêt
de Mormal - Saint-Quentin - La Fère, 18 h 00- 19 h 00,
une patrouille triple. Un premier Hs 126 est abattu par deux
pilotes. Un second, attaqué plein avant par le Capitaine
Coutaud et plein arrière
par le Sergent-Chef Teillet
(MB 152 n° 571), pique vers le sol, moteur en feu, à
19 h 00 et s'écrase vers Le Cateau, homologué
aux deux pilotes. Ce même jour les pilotes du GC
I/1 adoptent un système de pseudonymes pour les liaisons
radio, le Sergent-Chef Teillet
sera à l'avenir " Dormeur "... sur les ondes
seulement.
|
Bloc MB 152 du GC I/1
|
20 mai 1940
|
Couverture de la voie ferree Crerl - Verberie de 9 h 05 à
10 h 50, une patrouille légère. Vers 9 h 30
les quatre pilotes du GC I/1 voient
un appareil qu'ils identifient comme un Do l7 poursuivi par
cinq MS 406. Des parachutistes sautent à cinq kilomètres
au nord de Compiègne et le Dornier se dirige sur cette
ville ; le Capitaine Coutaud
le tire trois-quart avant, faisant voler les tôles du
capot, puis le Sergent-Chef Teillet
plein arrière. Le bimoteur s'écrase finalement
en feu dans les faubourgs ouest de Compiègne, sur le
terrain de football de Venette. " Dornier " pour
le GC I/1, "Junkers 88 "
pour le GC III/1 (qui identifie
correctement le Ju 88A-1 du 3./KG 51
dont l'équipage est capturé), il sera homologué
au Capitaine Coutaud, au Sergent-Chef
Teillet (MB 152 n° 269)
et aux cinq (en fait six) pilotes de Morane 406.
Le 21 mai 1940, couverture de terrain, une patrouille légère.
A l'issue d'un combat contre six Bf 109, Teillet
touché doit poser son Bloch 152 n°571 touché
à Creil ; il le récupèrera quatre jours
plus tard.
|
29 mai 1940
|
Couverture Pont-Sainte-Maxence - Cire-les-Mello, décollage
à 4 h 30, une patrouille double légère.
Les quatre pilotes attaquent un Do 17 qui se cache dans les
nuages mais finit par s'écraser à cinq kilomètres
à l'ouest de Laon, homologué au Capitaine Coutaud,
au Lieutenant Legentil, au Sous-Lieutenant
Rossigneux et au Sergent-Chef
Teillet sur son Bloch 152
n° 571. ICARE dans son n° 145 a donné le compte-rendu
du capitaine : " ... À 5 h 45, le Lieutenant
Rossigneux aperçoit (et
me signale) un Do 17, altitude 4 000 m, direction S.O. .je
savais que dès qu'il nous apercevrait, il ferait demi-tour,
et que s'il rentrait en prenant de l'altitude, partis de 2
500 m, après 45 minutes de vol, nous ne pourrions le
rejoindre sans nous laisser entraîner trop loin et risquer
la panne sèche. Je pris donc la décision de
le laisser pénétrer plus avant, rattrapant 4
000 m. " plein gaz " sur ses arrières. Au
bout de quelques minutes, approchant de son altitude, je vis
le Do faire demi-tour. le simulai alors une attaque qui m'amena
au bord de la rnise en vrille. L'intimidation réussit,
et le Do I 7 plongea vers la couche nuageuse salutaire. Ma
première déception fut qu'il parvint à
l'atteindre avant que nous l'ayons rejoint. ll ne me restait
plus qu'à espérer que le pilote ne sache pratiquer
le vol sans visibilité, ce qui l'obligerait à
rechercher son horizon en passant alternativement au-dessus
et au-dessous de la couche. ll fallait donc qu'une partie
de nous fut sous la couche, l'autre dessus. Je plongeai donc
dans la couche suivi de mes équipiers, mais dès
que ceux-ci me perdirent de vue (et furent entraînés
à leur insu au-dessous de la couche) je remontai au-dessus.
Ici commence le suspense : je maintiens mon cap avec l'espoir
de voir apporaître le Do l7. Les minutes comme celle-ci
paraissent longues et je commençai à désespérer,
lorsque je me fis tout à coup environné d'un
feu d'artifice de balles traçantes. Je réalisai
que sans le voir, je volais à hauteur du Do 17 , ce
qui permettait à son mitrailleur de tourelle de me
prendre pour cible, alors que moi-même, lié ou
tir axial de mon avion, je ne pouvois obsolument pas le tirer.
L'avion replongea dans les nuages mais je compris que mon
allure était plus grande que la sienne du fait de sa
trojectoire sinusoidale. Je réduisis donc les gaz et
attendis sans trop y croire une prochaine apparition. Encore
le suspense, mais cette fois-ci à mon avantage : le
Do l7 m'apparu tel un monstre noir, émergeant des nuages
à quelques dizaines de mètres devant moi. Ajustant
le tir " aux pieds et au manche ", je voyais les
projectiles de mes deux canons et deux mitrailleuses pénétrer
dans la masse sombre avec apparition de flammes. Cette fois-ci
l'avion disparut et je connus la fin de l'aventure à
l'atterrissage. En effet le Do I7 sortit au-dessous des nuages,
moteur gauche en flammes, vitesse réduite. Le Lieutenant
Legentil, et le Sergent-Chef
Teillet le virent sécraser
à 5 krn à l'ouest de Laon. Je reconnais que
ce jour, nous eûmes beaucoup de chance : 1) Tout s'est
déroulé selon un scénorio improvisé
mais la patrouille était très solide. 2) Je
n'ai pas été descendu par le mitraillage de
tourelle.
Le 3 juin 1940, bombardement de Paris, décollage sur
alerte de dix-huit Bloch du GC I/1
entre 13 h 00 et 13 h 20. A la suite des violents combats,
Teillet rentre à Chantilly,
son Bloch 152 n° 571 touché sans gravité.
|
6 juin 1940
|
Destruction Montdidier - Roye, décollage 16 h 45,
deux patrouilles doubles. Teillet
abat à 17 h 30 un Bf 109 qui s'écrase à
dix kilomètres au sud de Montdidier, toujours avec
le MB 152 n° 571. Il a écrit : " En fin
de mission nous sommes attaqués par des 109 (5000 m.)
Le Sergent Leprovost en queue
du peloton et en virage à droite est tiré par
un 109. ll dégage sec et part en vrille. Le Sgt-ch
Teillet qui prend de l'altitude
pour lui porter secours est pris à partie par le 109.
Celui-ci emporté par son élan vire devant le
Bloch qui le tire 3/4 arrière. L'avion ennemi pique
vers le sol occompagné par le Bl jusqu'à 3000
m. Le 109 s'écrase au sol et prend feu au sud de Montdidier
(109E-3 du 4./JG 3 dont le pilote
est tué). Le St-ch Teillet
seul sur le secteur croise un 109 vers Compiègne, l'ennemi
refuse le combat et fuit vers ses lignes. Retour seul en rose-mottes.
"
7 juin 1940. Au retour d'une couverture de la région
parisienne, Teillet se pose
à Claye-Souilly, terrain du GC
I/8, et accroche un avion à l'atterrissage. ll
ne récupèrera son Bloch 152 n° 571 que le
12. Replié depuis le 13 juin à Châteauroux
avec seulement quinze avions, le GC
I/1 reçoit deux Bloch 155. Teillet
s'entraîne le 15 sur le n° 702 et replie le n°
704 le 17 à Rochefort, lors d'un nouveau repli du groupe.
|
20 juin 1940
|
Couverture des ponts du Cher à parrir de Royan, une
patrouille double. Un Hs 126 [codé 4N + AM - WNr 3365]
du 4.(H)/22 lançant des
tracts est abattu à 20 h 00 au nord-est d'Argenton
par le Capitaine Coutaud,
le Sous-Lieutenant de Pins, l'Adjudant-Chef
Monchanin, l'adjudant Vérots,
le Sergent-Chef Teillet (MB
152 n°57l), le Sergent Leprovost
et trois pilotes du GC III/7 : Lieutenant
Mourier, Sous-Lieutenant Feuillerat
et Adjudant Littolff. Au sujet
de ce combat disputé par des conditions météo
très défavorables, Teillet
a écrit : " Apercevons éclatements de
DCA au N.E. d'Argentan puis un Hs 126. Nous l'attaquons mais
il vire dans les nuages. 6 M 406 arrivent (13 avions dans
le même nuage) . Le St-ch Teillet
a tout le côté gauche de sa cabine arrachée
par les balles (sans doute Bl). Le H 126 est abattu en flammes
dans un bois. Nous rejoignons Limoges à la nuit."
Seuls trois avions sur six rejoindront Royan, nouvelle base
du GC I/1 ... Le Sergent-Chef Teillet
essaie de se poser à Bergerac avec un appareil dont
le train ne rentre pas, par un temps épouvantable.
A son deuxième essai, il accroche un Caudron Luciole,
le toit d'une guérite, une haie, frôle un hangar
et une baraque et remonte dans le brouillard... Au troisième,
la jauge à zéro, il capote dans un champ de
blé ; coincé dans l'avion retourné, il
sera dégagé par des fantassins. Revenu au groupe
le 22 juin, il ne participera pas aux dernières missions
le 23, mais repliera le Bloch 155 n°704 à Agen,
ultime base du GC I/1.
|
Au cours de la Campagne de France,
le Sergent-Chef Teillet réalise
45 missions de combat entre le 10 mai et le 25 juin 1940, remportant
7 victoires confirmées et 1 probable. Demeuré au sein
de la 1ere Escadrille du GC I/1 après
l'armistice, il quitte le Groupe en février 1941. Le 21 juin
suivant il est rayé, à sa demande, des cadres de l'Armée
d'Active avec le grade d'Adjudant. Rappelé à l'activité
à la fin de la guerre, Teillet est affecté à
l'état-major de la 2eme Région aérienne du 7
mai au 11 octobre 1945.
Roger Teillet est décédé
le 12 octobre 1988 à Senlis dans l'Oise.
NB : L'unité tactique de l'escadrille est la patrouille, laquelle
peut-être organisée comme suit :
- Patrouille simple : 3 avions.
- Patrouille légère : 2 avions.
- Patrouille double : 6 avions (2 patrouilles simples).
- Patrouille double légère : 4 avions (2 patrouilles
légères).
- Patrouille triple : 9 avions (3 patrouilles simples).
- Patrouille triple légère : 6 avions (3 patrouilles
légères).
|