Germain Coutaud est né
le 16 juillet 1911 à Ysuf, près de Constantine en Algérie.
Entré à Polytechnique en 1931 puis à l'école
d'application de l'Armée de l'Air en 1934, il sort avec le
grade de Lieutenant et une affectation au GC
I/1 d'Etampes en 1936. Lorsque la seconde guerre mondiale éclate,
le Capitaine Coutaud commande la 1ere
Escadrille du GC I/1 qui est alors équipé
de Dewoitine D 510 et attend ses nouveaux Bloch MB 152. Le Groupe
est alors basé sur l'hippodrome de Chantilly.
En octobre 1939, le GC I/1 perçoit
ses premiers MB 152 à moteur 14 N-25. Ces appareils seront
changés à partir du 10 avril contre des versions à
moteur 14 N-49, plus puissants.
CAMPAGNE
DE FRANCE
13 mai 1940
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Le GC I/1 détache
ses avions disponibles à Couron de façon à
pouvoir opérer au-dessus de la Belgique. A 9 h 35, décollage
d'une patrouille triple en couverture de Namur - Huy - Hannut
- Gembloux. A 10 h 15, les huit pilotes sont guidés par
les tirs de la DCA de Namur sur un Do 17. On peut lire le compte-rendu
suivant dans ICARE n° 145 : " Dès qu'il aperçoit
la patrouille de chasseurs, le Do 17 tente de disparaître
en montant dans les nuages mais sentant qu'il sera tiré
par le chef de patrouille guide, il pique rapidement jusqu'au
sol, et prend la direction du sud-ouest en rase-mottes. Le Do
17 est attaqué par le Capitaine Coutaud,
le Capitaine Maréchal, le
Sergent Fiala et l'Adjudant Vérots,
qui le poursuivent à l'intérieur des lignes. L'ennemi
réagit par la manoeuvre et le feu de son mitailleur arrière.
Au bout de quelques minutes de combat l'avion ennemi semble
désemparé mais la nécessité de rassembler
la patrouille ne permet pas de contrôler le résultat
definitif. " Résultat : un Do 17 probable. Le Capitaine
Coutaud pilote ce jour là
le Bloch152 n°568 et partage cette victoire probable avec
les trois autres pilotes.
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15 mai 1940
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Le GC I/1 détache trois
patrouilles de la 1ere Escadrille à Couvron. Couverture
Marienbourg - Philippeville - Florennes - Fosse dans la matinée,
une patrouille triple à 2 500 m qui attaque un Dornier
l7 vers Namur à 10 h 05. : "La patrouille rejoint
le Do 17 et se place pour prononcer une attaque avec le soleil
dans le dos. Pendant un moment le Do l7 cherche à fuir
en prenant de l'altitude, mais se sentant rejoint et tiré
par le Capitaine Coutaud (MB
152 n°568), pique jusqu'au sol et tente de rentrer dans
ses lignes en rase-motte. L'Escadrille entière le poursuit
et après 5 minutes de combat, son moteur droit prend
feu ; puis le Do 17 appartenant à la 4.(F)/14
tombe et s'écrase dans un bois d'où s'échappe
une fumée. Position approximative : Namur 695, heure
: 11 h 15" Homologué au Capitaine Coutaud,
au Sergent-Chef Coader, au Sergent-Chef
Teillet (MB 152 n° 571
touché par le mitrailleur adverse) et au Caporal Pipa.
Protection d'une formation de bombardiers LeO 451 des GB
II/12 et GB I/31 sur Monthermé,
décollage de Couvron 18 h 30, une patrouille triple
(plus une de MS 406 des GC III/3
et GC II/6 et une autre de MB 152
du GC I/8). Au retour les Bloch
du GC I/1 attaquent par I'arrière
un Do 215 (En fait un Do 17Z du 5./KG
3) qui est laissé en feu entre Mézières
et Sedan. Victoire seulement probable pour les pilotes suivants
: Capitaine Coutaud (MB 152
n° 385), Sergent-Chef Teillet
(MB 152 n° 571), Coader,
Fiala et Tain,
Caporal Pipa.
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18 mai 1940
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Couverture Compiègne - Cambrai - forêt
de Mormal - Saint-Quentin - La Fère, 18 h 00- 19 h 00,
une patrouille triple. Un premier Hs 126 est abattu par deux
pilotes. Un second, attaqué plein avant par le Capitaine
Coutaud et plein arrière
par le Sergent-Chef Teillet
(MB 152 n° 571), pique vers le sol, moteur en feu, à
19 h 00 et s'écrase vers Le Cateau, homologué
aux deux pilotes. Ce même jour les pilotes du GC
I/1 adoptent un système de pseudonymes pour les liaisons
radio, le Sergent-Chef Teillet
sera à l'avenir " Dormeur "... sur les ondes
seulement.
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20 mai 1940
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Couverture de la voie ferree Crerl - Verberie de 9 h 05 à
10 h 50, une patrouille légère. Vers 9 h 30
les quatre pilotes du GC I/1 voient
un appareil qu'ils identifient comme un Do l7 poursuivi par
cinq MS 406. Des parachutistes sautent à cinq kilomètres
au nord de Compiègne et le Dornier se dirige sur cette
ville ; le Capitaine Coutaud
le tire trois-quart avant, faisant voler les tôles du
capot, puis le Sergent-Chef Teillet
plein arrière. Le bimoteur s'écrase finalement
en feu dans les faubourgs ouest de Compiègne, sur le
terrain de football de Venette. " Dornier " pour
le GC I/1, "Junkers 88 "
pour le GC III/1 (qui identifie
correctement le Ju 88A-1 du 3./KG 51
dont l'équipage est capturé), il sera homologué
au Capitaine Coutaud, au Sergent-Chef
Teillet (MB 152 n° 269)
et aux cinq (en fait six) pilotes de Morane 406.
Le 21 mai 1940, pour le Capitaine Coutaud,
deux missions, deux pannes : le matin Coutaud
se pose à Creil avec la pression d'huile à zéro
à bord du MB 152 n° 385. Le soir, après
un combat contre des bombardiers et leur escorte, il ramène
le MB 152 n° 529 avec une fuite d'huile et plus de munitions.
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Bloc MB 152 du GC I/1
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29 mai 1940
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Couverture Pont-Sainte-Maxence - Cire-les-Mello.
décollage 4 h 30, une patrouille double légère.
À l'issue de la mission, un Dornier 17 sera homologué
aux quatre pilotes : Capitaine Coutaud
(MB 152 n° 526), Lieutenant Legentil,
Sous-Lieutenant Rossigneux, Sergent-Chef
Teillet. ICARE dans son n°
145 a donné le compte-rendu du capitaine : "...
À 5 h 45, le Lieutenant Rossigneux
aperçoit (et me signale) un Do 17, altitude 4 000 m,
direction S.O. .je savais que dès qu'il nous apercevrait,
il ferait demi-tour, et que s'il rentrait en prenant de l'altitude,
partis de 2 500 m, après 45 minutes de vol, nous ne pourrions
le rejoindre sans nous laisser entraîner trop loin et
risquer la panne sèche. Je pris donc la décision
de le laisser pénétrer plus avant, rattrapant
4 000 m. " plein gaz " sur ses arrières. Au
bout de quelques minutes, approchant de son altitude, je vis
le Do faire demi-tour. le simulai alors une attaque qui m'amena
au bord de la rnise en vrille. L'intimidation réussit,
et le Do I 7 plongea vers la couche nuageuse salutaire. Ma première
déception fut qu'il parvint à l'atteindre avant
que nous l'ayons rejoint. ll ne me restait plus qu'à
espérer que le pilote ne sache pratiquer le vol sans
visibilité, ce qui l'obligerait à rechercher son
horizon en passant alternativement au-dessus et au-dessous de
la couche. ll fallait donc qu'une partie de nous fut sous la
couche, l'autre dessus. Je plongeai donc dans la couche suivi
de mes équipiers, mais dès que ceux-ci me perdirent
de vue (et furent entraînés à leur insu
au-dessous de la couche) je remontai au-dessus. Ici commence
le suspense : je maintiens mon cap avec l'espoir de voir apporaître
le Do l7. Les minutes comme celle-ci paraissent longues et je
commençai à désespérer, lorsque
je me fis tout à coup environné d'un feu d'artifice
de balles traçantes. Je réalisai que sans le voir,
je volais à hauteur du Do 17 , ce qui permettait à
son mitrailleur de tourelle de me prendre pour cible, alors
que moi-même, lié ou tir axial de mon avion, je
ne pouvois obsolument pas le tirer. L'avion replongea dans les
nuages mais je compris que mon allure était plus grande
que la sienne du fait de sa trojectoire sinusoidale. Je réduisis
donc les gaz et attendis sans trop y croire une prochaine apparition.
Encore le suspense, mais cette fois-ci à mon avantage
: le Do l7 m'apparu tel un monstre noir, émergeant des
nuages à quelques dizaines de mètres devant moi.
Ajustant le tir " aux pieds et au manche ", je voyais
les projectiles de mes deux canons et deux mitrailleuses pénétrer
dans la masse sombre avec apparition de flammes. Cette fois-ci
l'avion disparut et je connus la fin de l'aventure à
l'atterrissage. En effet le Do I7 sortit au-dessous des nuages,
moteur gauche en flammes, vitesse réduite. Le Lieutenant
Legentil, et le Sergent-Chef Teillet
le virent sécraser à 5 krn à l'ouest de
Laon. Je reconnais que ce jour, nous eûmes beaucoup de
chance : 1) Tout s'est déroulé selon un scénorio
improvisé mais la patrouille était très
solide. 2) Je n'ai pas été descendu par le mitraillage
de tourelle. "
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6 juin 1940
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Destruction Montdidier - Roye, décollage 16 h 45,
deux patrouilles doubles. Au retour à 7 000 m, les
Bloch livrent un combat contre des bombardiers et leur escorte
de Messerschmitt 110. Coutaud
sur le n° 526 abat en une passe un Bf 110 du 6./ZG
1 (2 tués) qui s'écrase vers 17 h 45
: Pont-Sainte-Maxence, suivi du regard par l'Adjudant-Chef
Monchanin.
Le 15 iuin 1940. Le GC I/1 s'est
replié à Châteauroux avec quinze MB 152
et le Commandant de la lere Escadrille effectue un vol d'entraînement
sur le dernier-né des usines Bloch, produit à
moins de dix exemplaires. Ce MB 155 n° 702 deviendra son
avion jusqu'à l'armisrice alors qu'il vola surtout
sur le MB 152 n° 526 depuis le 26 mai.
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20 juin 1940
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Couverture des ponts du Cher à parrir de Royan, une
patrouille double. Un Hs 126 [codé 4N + AM - WNr 3365]
du 4.(H)/22 lançant des
tracts est abattu à 20 h 00 au nord-est d'Argenton
par le Capitaine Coutaud (Bloch
155 n° 702), le Sous-Lieutenant de
Pins, l'Adjudant-Chef Monchanin,
l'adjudant Vérots, le
Sergent-Chef Teillet (MB 152
n°57l), le Sergent Leprovost
et trois pilotes du GC III/7 : Lieutenant
Mourier, Sous-Lieutenant Feuillerat
et Adjudant Littolff. Au sujet
de ce combat disputé par des conditions météo
très défavorables, Teillet
a écrit : " Apercevons éclatements de
DCA au N.E. d'Argentan puis un Hs 126. Nous l'attaquons mais
il vire dans les nuages. 6 M 406 arrivent (13 avions dans
le même nuage) . Le St-ch Teillet
a tout le côté gauche de sa cabine arrachée
par les balles (sans doute Bl). Le H 126 est abattu en flammes
dans un bois. Nous rejoignons Limoges à la nuit."
Seuls trois avions sur six rejoindront Royan, nouvelle base
du GC I/1 ... Le Sergent-Chef Teillet
essaie de se poser à Bergerac avec un appareil dont
le train ne rentre pas, par un temps épouvantable.
A son deuxième essai, il accroche un Caudron Luciole,
le toit d'une guérite, une haie, frôle un hangar
et une baraque et remonte dans le brouillard... Au troisième,
la jauge à zéro, il capote dans un champ de
blé ; coincé dans l'avion retourné, il
sera dégagé par des fantassins. Revenu au groupe
le 22 juin, il ne participera pas aux dernières missions
le 23, mais repliera le Bloch 155 n°704 à Agen,
ultime base du GC I/1.
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Lorsque la Campagne de France se termine,
le Capitaine Coutaud, seul Polytechnicien
à obtenir le titre d'As, a effectué 68 missions de combat
dont 55 entre le 10 mai et le 25 juin. Affecté le 3 août
1940 à l'état-major du général Pujo, secrétaire
d'état à l'Aviation du gouvernement de Vichy, le Capitaine
Coutaud est maintenu à la libération
au 1er Bureau de l'état-major général des Armées.
Promu commandant, il devient en mai 1946 commandant en second de l'école
de chasse de Meknes. Admis comme élève en janvier 1948
au centre d'enseignement supérieur aérien (CESA), il
y enseignera ensuite jusqu'en 1950. Lieutenant-Colonel en Janvier
de cette année, il est détaché en août
1951 à l'état-major du commandement en chef des forces
aériennes alliées en Centre Europe. En septembre 1953,
il prend la direction de la base aérienne d'Oran-la-Senia.
Un an plus tard, colonel, il devient chef d'état-major du 1er
CATAC. Le 20 septembre 1957, le ministre de la Défense Nationale
l'appelle à son état-major particulier. Germain
Coutaud quitte le service actif après avoir été
promu Général de Brigade le 1 janvier 1959. Il entreprend
ensuite une carrière de cadre supérieur puis de PDG
jusqu'en 1985 dans l'industrie.
Il est décédé le 8 octobre 2001.
NB : L'unité tactique de l'escadrille est la patrouille, laquelle
peut-être organisée comme suit :
- Patrouille simple : 3 avions.
- Patrouille légère : 2 avions.
- Patrouille double : 6 avions (2 patrouilles simples).
- Patrouille double légère : 4 avions (2 patrouilles
légères).
- Patrouille triple : 9 avions (3 patrouilles simples).
- Patrouille triple légère : 6 avions (3 patrouilles
légères).
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