André Legrand est né
le 5 décembre 1914 à Teste-du-Buch, en Gironde. Il s'engage
dans l'Armée de l'Air en 1935. Admis à Istres, il y
entre en octobre et en sort le 18 juillet 1936 avec son brevet de
pilote. En décembre 1938, il est affecté au GC
II/5 sur la base de Reims. Le 3 septembre 1939, le Sergent Legrand
est membre de la 3eme Escadrille, basée à Toul Croix-de-Metz
et équipée de Curtiss H-75. Début septembre 1939,
il est détaché à l'Escadrille
5/2 (Escadrille de veille du GC II/2
rebaptisée ECMJ I/16 en janvier
1940) equipée de Potez 631 mais rejoint à la fin du
mois son Escadrille d'origine. Quatre jours après la déclaration
de guerre de la France à l'Allemagne, le Sergent Legrand,
au retour d'une mission de couverture, doit se poser en campagne après
avoir été surpris par la tombé de la nuit. Il
froisse un plan à l'atterrissage.
CAMPAGNE
DE
FRANCE
20 septembre 1939
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Protection de reconnaissance Apach - Büdingen,
six Curtiss du GC II/5, attaqués
par cinq Bf 109 E du I./JG 53. Les
Français perdent deux avions et un pilote blessé
saute en parachute dans un premier temps. Après avoir
manqué percuter de face deux " 109 ", le Sergent
Legrand sur son Curtiss H-75A-1
n°1 vire très serré, se met dans leur queue
et à cinquante mètres tire un Messerschmitt qu'il
envoie s'écraser à Oberhern. Le pilote de la 3./JG
53 trouve la mort. Deux autres Bf 109 touchés par
d'autres pilotes du GC II/5 ne seront
pas homologués, bien que l'un d'eux doive se poser sur
le ventre dans ses lignes, gravement endommagé.
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6
novembre
1939
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Protection d'un Potez 63-11 du GR
II/22 en reconnaissance sur la Sarre, par neuf Curtiss,
en début d'après-midi. Vingt-sept Bf 109 D du
JGr 102 les attaquent avec l'avantage
de l'altitude. Au cours du combat les Français vont revendiquer
cinq victoires sûres et cinq probables, dont deux Me 109
sûres pour pour le Sergent Legrand
seul, aux commandes de son H-75 n° "1" : .
... Manche au ventre, je passe en dessous d'eux. Un 109 s'encadre
dans mon collimateur, gros comme une maison. Une courte rafale
porte en plein dans son fuselage. Touché dans ses oeuvres
vives, il part en pigué. Ses deux équipiers dégagent
et rampent le combat. Piquant à mon tour, je poursuis
l'adversaire. De gibier, me voici à nouveau chasseur.
Un coup d'oeil derrière pour assurer mes fesses... ...Personne
! Je m'approche du Fritz -300 m. - 100 m. -50 m. - c'est bon
! Mon doigt appuie sur le contact des mitrailleuses. Les balles
percent la tôle. Je vois les points d'impact, à
20 mètres à peine... " Ce premier Bf
109 s'écrase à 15 h 00 sur la rive gauche de la
Moselle, son pilote expirant peu après. Puis Legrand
remonte à 5 000 m où il rencontre l'Adjudant Dugoujon,
et à deux, ils protègent le Potez de reconnaissance
que tout le monde avait oublié dans la mêlée.
Voyant sept " Dora ", ils prennenr de l'altitude et
piquent à 15 h 30 sur les Messerschmrtt qui se drrigent
droit sur eux. Legrand qui assure
la protection de son camarade est pris pour cible par deux Bf
109 : " Je prends a partie celui qui m'attaquait par
en dessus. ll accepte le combat individuel. En deux tours, je
suis dans sa queue et le tire. ll pique (toujours le mème
système de retournement). Vers 1500 mètres, son
hélice s'arrête. Je le tirais depuis 6 000 mètres.
Je l'abondonne et me retourne sur deux assaillants qui prennent
la fuite... J'ai abandonné le Me à environ 1 500
m d'altitude, se dirigeant vers la Moselle moteur coupé.
" Ce Bf 109 D- 1 se posera en catastrophe vers Mannheim
(Allemagne), endommagé à 70%. A court de carburant,
Legrand doit se poser en campagne
près de Lesse avant de regagner Toul.
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10 janvier 1940
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Début d'après-midi, protection de reconnaissance
vers Sarrebruck par quinze Curtiss du GC
II/5. Le dispositif attaque deux patrouilles de trois
Bf 109 E-3 du I./JG 2 vers Sarrebrûck
et en abat deux, dont un à 13 h 15 par le Sergent Legrand
aux commandes de son Curtiss n° "1", après
un long combat tournoyant :" Virages, piqués suivis
de ressources très brutales. Nous descendons ainsi
à 3 000 mètres environ. Là une fumée
de plus en plus épaisse s'échappe du Messerschrnitt
et des flammes apparaissent au raccord de l'aile droite et
du fuseloge. Le pilote allemand largue sa cabine. J'abandonne
l'appareil désemparé un peu à l'est de
Kirschnaumen. "
Le 5 février 1940, le Sergent Legrand
devient Sergent-Chef.
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Curtiss H-75 du GC II/5
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15 mai 1940
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Destruction sur Metz, une patrouille triple,
dix Curtiss, décollage 5 h 30. Orientés par la
radio, les pilotes attaquent deux pelotons de Heinkel 111 du
III./KG 55 sans autre résultat
que deux Curtiss perdus (deux blessés). Selon les souvenirs
d' André Legrand,
quatre Heinkel auraient abandonné leur formation après
avoir largué leurs bombes, moteurs en feu. ll semble
que sur le chemin du retour la patrouille rencontre un Henschel
126 qui ne peut être abattu. ll demeure donc seulemenl
"probable" vers Clouange pour le Capitaine Monraisse
(Curtiss H-75A-2 n° 173), le Sous-Lieutenant Klan,
l'Adjudant-Chef Dugoujon et le
Sergent-Chef Legrand
(Cuniss H-75A-1 n° 1).
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16 mai 1940
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Destruction Metz - Étain, cinq Curtiss,
décollage 9 h 15. La radio oriente les pilotes à
2 500 m sur Königsmachsr où ils trouvent, mille
mètres plus bas qu'eux, un Hs 126 solitaire. A leur vue
le Henschel pique jusqu'au sol, puis s'enfuit en rase-mottes.
Le Capitaine Monraisse sur
le Curtiss H-75A-2 n° 179 le tire plein arrière,
les quatre autres le prenant en tenaille. Mitrailleur très
vite hors de combat, le Henschel du I.(H)/12
s'écrase à 10 h 45 sur une dernière rafale
du Sergent-Chef Legrand
entre Esch-sur-Alzette et Mondercange. Outre les deux déjà
cités, ses trois autres vainqueurs sont l'Adjudant-Chef
Dugoujon, le Sergent Audrain
et le Caporal-Chef Svetlik.
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20 mai 1940
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Une patrouille triple se met en attente à partir de
8 h 00 sur le secteur de Metz - La Chaussée, mais trois
retours sur pannes ne laissent que cinq pilotes sur huit.
Ils sont orientés dans un premier temps sur un avion
suspect survolant l'est de Nancy à 6 500 m, puis une
fois sur le secteur sur un autre suspect, à l'ouest
de la même ville, direction sud-ouest. Un Dornier 17
solitaire de l'escadrille de reconnaissance I.(F)/22
est intercepté soleil dans le dos à 7 500 m,
à l'ouest de Commercy. Tous les pilotes effectuent
des passes sur le bombardier qui se réfugie dans les
nuages, poursuivi par trois Curtiss, pendant qu'un quatrième
l'attend au-dessus et le dernier au-dessous. Pour sa part
le Commandant Petitjean-Roget
l'attaque plein avant aux commandes du Curtiss H-75A-2 n°
150. Finalement, un moteur en feu, le Dornier codé
[4N + GH] descend en rase-mottes et se pose près de
Crépey, à seize kilomètres au sud-est
de Toul ; l'équipage compte un tué et deux prisonniers.
Le bimoteur est homologué aux cinq pilotes : Commandant
Petitjean-Roget, Lieutenant
Houzé,
Sous-Lieutenant Ruchoux, Sergent-Chef
Legrand
et Sergent Bouhy. [inefficacité
des mitrailleuses de 7,5 mm armant le Curtiss H-75 est évidente,
Albert Petitlean-Roget
mentionnant dans son rapport qu'il a dû exécuter
une vingtaine de passes !
Décollage 8 h 30 pour une patrouille triple, onze Curtiss,
en destruction sur Verdun. Un Henschel 126B-1 du 5.(H)/13
est abattu près d'Herméville par le Commandant
Petitjean-Roget aux
commandes du Curtiss H-75A-3 n° 202, en collaboration
avec les Capitaines Destaillac
et Monraisse.
Les autres pilotes s'engagent contre les Bf 109 et en abattent
un. Pour sa part le Sergent-Chef Legrand
en tire un qui émet une grosse fumée noire mais
ne sera pas homologué.
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25 mai 1940
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Destruction Briey - Mangiennes, onze Cuniss, 10 h 45 - 12
h 15. Vers 11 h 30, la patrouille rencontre un Dornier 17
de la l.(F)/22 à 6 500
m. Pendant que trois pilotes restent en protection, les autres
attaquent le bombardier qui à leur vue pique vers le
sol et s'enfuit en rase-mottes vers le nord-est. Après
plusieurs attaques les chasseurs l'abandonnent au nord-est
de Fontoy. On apprendra plus tard qu'il s'est posé
sur le ventre au nord-est d'Angevillers, ce qui permettra
de l'homologuer aux huit pilotes : (Cpt) Monraisse
Hubert (Curtiss H-754-2 n° 150), (Lt) Trémolet
René (Lt) Hébrard
Marcel (S/C) Legrand
André (C/C) Svetlik
Ladislav
(Slt) Boudier (A/C) Gras
Georges (Adj) Lachaux
François.
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Le 8 juin 1940, onze Curtiss H-75 détachés à
Connantre assurent la protection d'une reconnaissance de Potez 63-11
du GR II/33 sur Poix - Conty, de l0 h
15 à 11 h 15, patrouille triple de Morane 406 du GC
II/1. ll s'ensuit vers 11 h 00 un combat contre des Bf 109 protégeant
des bombardiers, au cours duquel deux chasseurs seront homologués
aux pilotes du GC II/5 ; le Sergent-Chef
Legrand
en tire un mais ne peut obtenir de résultat net.
Le 13 juin, le GC II/5 doit se replier
sur Dijon. Avant de quitter Toul, le Groupe incendie plusieurs appareils
dont le n° 1 habituellement piloté par le Sergent-Chef
Legrand et sur lequel il semble avoir
obtenu toutes ses victoires. De repli en repli, le GC
II/5 arrive dans le sud avant de traverser la Méditerranée
pour se trouver à Saint-Denis-du-Sig, près d'Oran, avec
34 appareils. Au cours de la Campagne de
France, entre le 10 mai et le 25 juin 1940, le Sergent-Chef Legrand
a effectué entre 18 et 20 missions et remporté 7 victoires
confirmées plus une probable.
3 juillet 1940
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Lors de l'attaque britannique contre la flotte
française à Mers-el-Kébir, le 3 juillet
1940, Legrand parvient à
abattre un Blackburn Skua (qui en fait s'échappe sans
dommage) chargé d'escorter les Fairey Swordfish du porte-avions
HMS Ark Royal.
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8
novembre
1942
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Plus de deux ans plus tard, à l'occasion
de l'opération "Torch", le débarquement
anglo-américain en Afrique du Nord, le Lieutenant Legrand
se bat de nouveau aux côtés des pilotes du GC
II/5 et remporte une nouvelle victoire, cette fois-ci au
dépend d'un F4F-4 américain de la VF
41 à l'Est de Casablanca. Il en tire un second qui
part en vrille mais son H-75 devient à son tour la cible
de plusieurs autres chasseurs américains qui endommagent
sérieusement son n° 37. Si l'appareil est détruit
au cours de l'atterrissage forcé qui suit, le pilote
s'en sort indemne.
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Quelques semaines plus tard, le GC II/5
est rééquipé de Curtiss P-40F et deviendra le
premier Groupe de Chasse de l'Armée de l'Air à reprendre
le combat, en Tunisie. En janvier 1944, le Lieutenant Legrand
quitte son Groupe (rebaptisé GC
2/5 "Lafayette"), pour rejoindre le centre d'instruction
à la chasse de Meknès (CIC) dont il commandera les escadrilles
C4 puis C1.
De septembre 1945 à octobre 1946, le Capitaine Legrand
est moniteur sur la base école de Tours, puis passe au 3eme
Bureau du commandement supérieur de l'école de l'Air.
En avril 1950, il est affecté sur la base école 706
de Cazaux qu'il quitte en 1952 pour la BA 707 de Marrakech. Promu
Commandant en juillet 1953, André
Legrand rejoint un an plus tard la métropole où
il sert sur la base de Reims. Il est ensuite mis à la disposition
du commandant de la 5eme Région Aérienne en Algérie,
prenant la direction du Groupement d'Aviation Légère
d'Appui 1/473. En janvier 1960, le Lieutenant-Colonel Legrand
est détaché à l'Etat-Major des Forces Aériennes
Alliées Centre-Europe puis, l'année d'après,
à l'Etat-Major de la FATAC. Ayant terminé sa carrière
en Afrique Noire, le Colonel Legrand
quitte l'Armée de l'Air le 1 janvier 1969.
Il est décédé le 21 novembre 2003
NB : L'unité tactique de l'escadrille est la patrouille, laquelle
peut-être organisée comme suit :
- Patrouille simple : 3 avions.
- Patrouille légère : 2 avions.
- Patrouille double : 6 avions (2 patrouilles simples).
- Patrouille double légère : 4 avions (2 patrouilles
légères).
- Patrouille triple : 9 avions (3 patrouilles simples).
- Patrouille triple légère : 6 avions (3 patrouilles
légères).
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