Robert Williame est né
le 24 février 1911 à Saint-Martin-les-Boulogne, dans
le Pas-de-Calais. Premier d'une famille de trois enfants, il se passionne
très tôt pour l'aviation. Après avoir passé
son baccaluaréat avec succès, il entre au Prytanée
militaire de la Flèche. En octobre 1930, il est admis à
Saint-Cyr où il est nommé un an plus tard Sergent. Le
1er août 1932, il sort avec le grade de Sous-Lieutenant et rejoint
à Versailles l'école d'application de l'Armée
de l'Air. En mai 1933, il est élève pilote à
l'école d'Avord où il est breveté le 4 août
suivant. Le 19 mars 1934, il obtient aussi son brevet de pilote de
tourisme avant d'effectuer un stage de voltige à Etampes. Le
1er octobre 1934, il reçoit enfin sa première affectation
pour la 1ere Escadrille de la 2eme Escadre de
Chasse, basée à Tours et qui vole sur Nieuport
Deulage NiD 62 et 622. Fin 1935, le Lieutenant Williame
participe au premier stage de parachutisme militaire organisé
à Avignon-Pujaut. Au terme de ce stage, il devient le troisième
moniteur parachutiste de l'Armée de l'Air. Devenue 1ere Escadrille
du GC I/2, son unité s'installe à
Chartres à la fin de 1936 et se rééquipe en Dewoitine
500 et 501. Devenu commandant de son Escadrille un an plus tard, Robert
Williame est promu Capitaine en septembre 1938.
Le 3 septembre 1939, jour où la France déclare la guerre
à l'Allemagne, le Capitaine Williame
commande la 1ere Escadrille du GC I/2 désormais
équipée de MS 406 et basée à Beauvais-Tillé.
En octobre le Groupe revser ses avions pour percevoir des appareils
neufs équipés de canon HS 404 aux performances supérieures
aux traditionnels HS 9. Comme promis à un ouvrier agricole
de la région, sept pilotes de l'Escadrille reçoivent
comme marraine l'une de ses sept filles. Pour le Capitaine Williame,
ce sera la plus jeune, Juliette, prénom par lequel il nommera
ses avions dans ses souvenirs, de Juliette I à Juliette III.
L'automne constitue une période épouvantable pour le
Capitaine. Le 21 octobre, alors qu'il participe à l'une des
occupations favorite des pilotes de l'Escadrille, le tir de précision
à la carabine, une balle tirée par lui frappe mortellemnt
l'Adjudant de Chasteigner. Bien que blanchi
par la commission d'enquête, il restera marqué par cet
accident. A partir du 14 novembre, une forte angine le cloue au lit,
suivie d'une fièvre tenace qui le conduit à l'hôpital.
Déclaré convalescent jusqu'au 1er Mars 1940, il revient
cependant à son Escadrille le 12 février 1940, la fièvre
ayant disparue. Le Groupe a alors quitté Beauvais pour la Lorraine
pour participer à la protection des appareils de reconnaissance.
CAMPAGNE
DE
FRANCE
2 avril 1940
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Protection de reconnaissance, deux patrouilles triples, 10
h 15 - 11 h 55. La mission, annulée pour cause d'indisponibilité
du Potez 63, se transforme en destruction. La patrouille triple
de la lere escadrille est d'abord orientée sur un Do
17, puis quatre Bf 109, mais volant trop haut. Un autre Dornier
signalé sur Saverne à 7 000 m est sur le point
d'être attaqué par une patrouille, mais il se
met en piqué pour lui échapper. Ce faisant il
tombe sur les deux autres qui lui avaient coupé la
route du retour vers l'est. Pleins gaz, quatre Morane parviennent
à distance de tir (250 mètres) après
une poursuite qui se termine en rase-mottes. Arrivés
sur Erstein, l'Adjudant Bruckert
ouvre le feu, mais probablement touché par le mitrailleur
périt dans son Morane en tentant de le poser. Le Capitaine
Hyvernaud, le Capitaine Williame
sur son MS 406 n° 686 "1" et le Sous-Lieutenant
Pichon font un total de cinq
passes, réduisant le mitrailleur arrière au
silence. Williame dégage,
son collimateur couvert d'huile, mais en rentrant il est la
cible de tirs venus du sol : ses dernières munitions
vont à deux groupes de soldats allemands, ce malgré
des ordres l'interdisant. Trois monteurs télégraphistes
affirmeront avoir vu le Dornier fumer, puis disparaître
derrière des arbres au-dessus desquels serait ensuite
monté un gros nuage de fumée noire. Le Dornier
(de la 4.(F)/121 ) ne sera accordé
que probable aux quatre pilotes, ce qui se révèle
encore optimiste car il ne rentre réellement qu'avec
de légers dommages.
En permission lors de l'attaque du 10 mai 1940, le Capitaine
Williame ne rejoint le groupe
que le 12, alors que se produit une légère accalmie
dans l'activité aérienne ennemie, ce qui fait
dire à un pilote : " ll suffit que le Capitaine
arrive pour qu'on n'en voie plus. Vous devriez reportir en
permission. "
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Le 20 mai 1940. Couverture Saint-Quentin - Rethel, une patrouille
triple de 17 h 15 à 18 h 00 sur secteur. En attaquant quatre
Bf 109 E avec ses huit équipiers, le Capitaine Williame
se trouve en fait face à une trentaine de Messerschmitt des
l./JG 27 et I./JG 51
! Isolé avec le chef de patrouille allemand et son équipier,
il va tirer le "leader" lorsque les deux Allemands montent
vers une légère couche nuageuse, suivis par le Français.
Voyant en l'équipier un novice peu à l'aise dans les
nuages et pressé d'en sortir, Williame
s'y cache pour s'approcher à bonne distance. Hélas le
chef de patrouille ennemie profite de ce que la couche n'est pas très
épaisse, voit le Capitaine qui s'apprêter à tirer
son équipier, et crible le Morane dans lequel on retrouvera
les impacts d'au moins cinq obus et sept balles. Après avoir
à nouveau trouvé refuge dans les cumulus, Williame
parvient à rentrer à Damblain, mais son Morane- Saulnier
406 n° 686 "1" devra être transféré
à l'ARAA (Atelier de Réparation de l'Armée de
l'Air) d'Aulnat, irréparable au groupe.
Après avoir utilisé divers avions disponibles, Williame
va le 25 mai chercher à Toul-Ochey le MS 406 n° 966. Cet
avion, endommagé le 10, avait été laissé
là en attendant des réparations, et celle-ci faites,
il échange son ancien code "9" pour le "1"
de chef d'escadrille.
Le ler juin 1940, couverture de Vesoul, une patrouille triple, 14
h 35 - 17 h 00. Après avoir poursuivi et tiré de trop
loin une formation de trente Heinkel 111, le Capitaine Williame
(MS 406 n° 966) reste au contact des bombardiers allemands et
oriente par ses messages radio des Dewoitine 520 du GC
II/7, des Morane 406 du GC I/2 et trois
Curtiss H-75 du GC I/5 qui parviendront
à en abattre quelques-uns. Se posant pour ravitailler à
Lons-le-Saulnier, il est pris pour cible par la DCA du terrain qui
ne lui cause heureusement aucun dégât.
Le 2 juin 1940. Couverture Vesoul - Besançon, 9 h 45 - l1
h 40. La patrouille double dirigée par le Capitaine Williame
poursuit sans pouvoir les rejoindre sept Junkers 88 pendant cent kilomètres.
Les mitrailleurs logent quatre balles dans son n° 966 et aucune
victoire n'est obtenue par les trop lents Morane, ce qui vaudra au
groupe des réflexions désagréables du général
commandant la ZOAE...

5 juin 1940

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Destruction sur alerte Colombey-les-Belles,
une patrouille triple, 12 h 30- 14 h 00. Sur Neufchàteau.
le dispositif voit un premier peloton de quinze Junkers 88 faisant
route a l'ouest, donc encore une poursuite infructueuse en previsron
Un second peloton d'égale importance suivant le premier,
il est aussitôt attaque trois-quart avant. Après
une première passe, Williame
degage en cabre, un des bombardiers piquant avec des mouvements
désordonnés. Il pique ensuite à la verticale
sur un second, puis tire trois rafales sur un des moteurs du
même appareil, finissant par le mettre en feu. A bout
de munitions, une balle dans le réservoir d'huile, le
moteur au ralenti, Williame
est contraint de se poser en campagne, MS 406 n° 966 indisponible
pour plusieurs jours. Trois victoires seront homologuées
aux pilotes du GC I/2, bien que quatre
manquants aient été notés dans le vol des
Junkers. Pour sa part Williame
en partage un tombé au sud-est d'Arbot [Ju 88A-1 "9K
+ KM" WNr 5018 du 4./KG 51
- 2 tués et 2 prisonniers blessés] avec le Lieutenant
de la Bretonnière, le Sous-Lieutenant
Pichon, les Sergents De
Puybusque et Meunier,
et un au nord-est de Chaumont [Ju 88A-1 "9K + HM"
du 4./KG 51 - 4 prisonniers dont
1 blessé] avec les Sous Lieutenants Husson
et Audebert ainsi que le Sergent
De Puybusque.
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MS 406 du GC I/2
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8 juin 1940
 
 
 
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Appelé en renfort sur le front de la Somme, le GC
I/2 détache une patrouille triple à Coulommiers,
base du GC II/7. De là elle
participe à une destruction sur Beauvais - Gisors -
Persan- Beaumont entre 16 h 00 et 16 h 30, protégée
par des Curtiss du GC II/4. Le Capitaine
Williame a écrit :
" En bas, le sud de Beauvais brûlait, envoyant
jusqu'à Paris un cône de fumée qui cachait
le sol. Gisors brûlait aussi. Partout des incendies,
moins importants mais nombreux. C'était un spectacle
pénible à voir. Soudain, dans la direction de
Soissons, des éclatements de DCA attirèrent
mon attention. le découvris bientôt quinze à
vingt avions de bombardement. Au-dessus et sur res côtés,
de nombreux Messerschmidt (sic) 110 et 109 les accompagnaient
en direction du nord-ouest. Je me dirigeai vers eux. Notre
protection suivait mal. Nous avions le soleil pour nous. Je
réussis à nous placer denière une patrouille
de trois Messerschmidt 109 qui faisaient partie d'un ensernble
de neuf appareils flanquant vers le sud l'expédition
ennemie. Je tirai de très près, à peu
près en même temps que Chalupa
et Audebert, le chasseur de gauche,
puis seul celui du centre à vingt mètres. Ils
partirent tous les deux en vrille et en flammes. Pichon
et Meunier virent le premier
s'écraser à cinq kilomètres au nord-est
du terrain de Beauvais, tandis que sous les yeux de Pichon
et Audebert, le second subissait
le même sort, sensiblement au même endroit. En
voyant son chef de roth (sic) et l'autre équipier de
sa patrouille prendre feu, le troisième pilote fit
un léger virage à droite et m'aperçut
à vingt mètres de lui. Il donna deux ou trois
coups de pied, de l'air d'un monsieur qui ne soit vraiment
pas ce qu'il va faire. Je lui lâchai alors une rafale.
Il se mit en piqué accentué vers ses lignes
en dégageant une grosse colonne de fumée. Chalupa,
Pichon et Meunier
le virent comme moi, mais personne ne put être témoin
de son écrasement car déjà d'autres Messerschmidt
tentaient de nous manoeuvrer. Je jetai un coup d'oeil derrière
et au-dessus... " Les trois Bf 109 seront homologués
[Un Me 109E-3 de la 7./JG 3, 1 Me
109E-3 de la 2./JG 26 et 1 de la
3./JG 26 sont abattus] Williame,
le premier partagé avec les Sous-Lieutenants Chalupa
et Audebert.
Destruction Soissons - Attichy, 19 h 45 - 20 h 15 sur secteur,
une patrouille double de Morane 406 du GC
I/2, avec deux doubles de Bloch 152 du GC
II/6 et une triple de Dewoitine 520 du GC
II/3. Arrivant sur Soissons. le capitaine identifie des
Stuka, mais au moment de les attaquer, doit engager un court
combat tournoyant contre quatre Bf 109. Ensuite il plonge
derrière eux sur les Ju 87, mais doit stopper son attaque
en voyant des cocardes sur leurs ailes. Finalement ce sont
des Stuka bien allemands qu'il engage, tirant le premier en
piqué à la verticale, et l'envoyant s'écraser
au nord-est de la forêt de Villers-Cotterêts.
Un second attaqué ensuite laisse une traînée
de fumée après avoir tenté de fuir en
rase-mottes, mais subit le même sort que le premier
dans le même secteur. Voyant trois Morane poursuivre
un Ju 87 dans la vallée de l'Ourcq, Williame
suit le combat et comme il l'avait pensé, en tentant
de leur échapper le Stuka vient de lui-même se
placer devant lui. Mitrailleur hors service, bombes larguées,
le Stuka fuit en virages, puis en ligne droite, perdant des
morceaux de tôle, pilote sans doute blessé. A
bout de munitions, Williame
doit abandonner une véritable épave volante
qui lui sera homologuée, partagée avec le Lieutenant
Monty. Son avion indisponible
en réparations, Williame
a utilisé ce jour-là le Morane n° 680 "5",
monture habituelle du Sous-Lieutenant Husson.
Épuisé par les nombreuses missions, malade,
Williame ainsi que le Capitaine
Patureau-Mirand de la 2eme Escadrille vomissent de
la bile au réveil. Certains de leurs pilotes ne panicipent
plus aux missions ; hommes et avions du GC
I/2 sont "au bout du rouleau". Le 13 juin, lors
de l'évacuation de Damblain pour Dijon, première
étape du repli qui conduira le GC
I/2 à Nîmes, le Sous-Lieutenant Husson
ramène le Morane n° 966 "1" de Williame.
Avec cet avion le chef de la Spa 3 effectue une reconnaissance
le 14 juin sur Dijon - Langres - Gray et l'est de Gray, ce
qui lui permet de se rendre compte de l'ampleur de la débâcle.
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Epuisé par les nombreuses missions, malade, Williame
ainsi que le Capitaine Patureau-Mirand
de la 2eme Escadrille vomissent de la bille au réveil. Certains
de leurs pilotes ne participent plus aux missions ; hommes et avions
du GC I/2 sont "au bout du rouleau".
Le 13 juin, lors de l'évacuation de Damblain pour Dijon, première
étape du repli qui conduira le GC I/2
à Nimes, le Sous-Lieutenant Husson
ramène le MS 406 numéro 966 de Williame.
Avec cet avion, le chef de la Spa 3 effectue une reconnaissance le
14 juin sur Dijon - Langres - Gray et l'est de Gray ce qui lui permet
de se rendre compte de l'ampleur de la débacle.
Entre le 3 septembre 1939 et le 9 mai 1940, le Capitaine Williame
a réalisé 26 missions de guerre auxquelles s'ajoutent
50 autres missions entre le 10 mai et le 25 juin pour un total général
de 104 heures 05 de vol de guerre.
Fin juillet, Robert Williame contracte
la scarlatine et doit s'aliter. Son groupe ayant été
dissous le 20 août, il est affecté au GC
II/9, basé à Salon-de-Provence et équipé
de Bloch MB 152. Il y arrive le 2 octobre 1940, à peine rétabli.
Nommé commandant de la 2eme Escadrille, le Capitaine Williame
se tue le 31 du même mois au cours d'une scéance de combat
simulée avec le Commandant Georges Tricaud.
Son MB 152 n° 16 codé "21" s'écrase après
avoir décroché à 1000 m d'altitude, sans doute
suite à un malaise du pilote.

NB : L'unité tactique de l'escadrille est la patrouille, laquelle
peut-être organisée comme suit :
- Patrouille simple : 3 avions.
- Patrouille légère : 2 avions.
- Patrouille double : 6 avions (2 patrouilles simples).
- Patrouille double légère : 4 avions (2 patrouilles
légères).
- Patrouille triple : 9 avions (3 patrouilles simples).
- Patrouille triple légère : 6 avions (3 patrouilles
légères).
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