James Doolittle voit le jour sous le soleil de Californie,
à Alameda, le 14 décembre 1896. Au tournant du siècle,
ce fils de charpentier déménage avec sa famille pour
s'installer dans le camp de chercheurs d'or de Nome en Alaska. C'est
dans cette nature sauvage qu'il grandit et se forge un caractère
d'aventurier et de casse-cou. De retour en Californie, il fait ses
études au Los Angeles Junior College avant de s'inscrire à
l'école des mines de Californie. Son ambition était
de devenir ingénieur et de travailler dans des exploitations
minières de l'Ouest américain. Mais, entre temps, il
a découvert l'aviation qui le passionne au plus haut point.
De 1910 à 1912, il travaille à la construction de son
propre planeur, s'appuyant sur des plans fournis par un magazine.
En 1917, année de l'entrée en guerre
des USA, Doolittle met un terme à ses études d'ingénieur
et s'enrôle dans le Signal Corps Reserve comme cadet. Il suit
des cours au sein de l'école d'aéronautique militaire
ainsi que sur le terrain de Rockwell en Californie.
Le 11 mars 1918, il est nommé aspirant. James
Doolittle quitte la côte Ouest et part pour le Texas afin de
rejoindre son affectation. Bien que s'étant porté volontaire
pour aller se battre en Europe, notre homme ne quitte pas le territoire
des Etats-Unis. Souvent muté, Doolittle est successivement
basé dans l'Ohio, puis en Louisiane avant de retourner en Californie.
En 1919, il sert comme instructeur de tir avant de boucler à
nouveau ses malles et de repartir au Texas. Il vole au sein du 104th
Squadron puis dans les rangs du 90th
Squadron. Les opérations se limitent à des patrouilles
le long de la frontière américano-mexicaine ainsi qu'à
des vols d'entraînement. Le 1 juillet 1920, il est promu au
grade de lieutenant et part suivre des cours de perfectionnement dans
l'Ohio.
Le 4 septembre 1922,
James Doolittle commence à se faire connaître et remarquer.
Pilotant un de Havilland DH-4B de l'US Army Air Service spécialement
équipé avec des instruments de navigation, il se lance
pour défi de traverser les USA en moins de 24 heures depuis
la côte Est jusqu'à la côte Ouest. Le raid
transcontinental, le premier du genre dans ces conditions,
est un succès ! Décollant de Pablo Beach en Floride,
James Doolittle se pose à San Diego (Californie) après
un vol de 21 heures et 19 minutes. L'exploit est de taille, ce qui
vaut au jeune lieutenant de recevoir la Distinguished Flying Cross
des mains de ses supérieurs.
En juillet 1923, "Jimmy" entre au Massachusetts
Institute of Technology, le célèbre MIT, afin d'y suivre
des cours d'ingénieur en aéronautique. Il sera diplômé
en 1924 et obtiendra en 1925 le premier titre américain de
docteur en aéronautique. Tout au long de sa vie notre homme
entretiendra des relations privilégiées avec le MIT
et participera activement aux nombreuses recherches menées
par le College. Parallèlement, James Doolittle poursuit sa
carrière dans l'armée. Il dirige des tests sur l'accélération
des avions à Mc Cook field en 1924. En juin 1925, il est affecté
à la base aéronavale de Washington DC et travaille sur
les hydravions rapides. Il tente régulièrement de battre
des records de vitesse. Doolitle est engagé dans la Schneider
Cup Race, une course d'hydravions, qu'il gagne en 1925 aux
commandes d'un appareil produit par Curtiss. L'année suivante,
il obtient de la part de l'armée un congé pour participer
à une tournée en Amérique du Sud. En avril 1926,
au Chili, il se brise les deux chevilles. Cela ne l'empêche
pas le lendemain de participer au meeting aux commandes de son biplan
Curtiss P-1 "Hawk". Doolittle est finalement rapatrié
par avion sanitaire aux Etats-Unis, où il est hospitalisé,
les deux chevilles dans le plâtre.
Il reste au Walter Reed Hospital de Washington DC
jusqu'en avril 1927 afin d'y suivre une longue et pénible rééducation.
A sa sortie, il rejoint le terrain militaire de Mc Cook. Sur place,
il poursuit ses travaux et ses recherches, tout en participant à
l'instruction de pilotes de bombardiers réservistes. En septembre
1928, avec le Guggenheim Full Flight Laboratory, il travaille sur
les équipements et instruments de vol par mauvaise visibilité.
Il participe à la mise au point de l'horizon artificiel et
d'autres appareils de navigation. Joignant la théorie à
la pratique, Doolittle teste lui-même ces équipements
et réalise le 24 septembre 1929 le premier
vol "en aveugle" de l'histoire à bord d'un
Consolidated NY-2. L'expérience est concluante, le pilote et
l'appareil sont sains et saufs. Avec des équipements adéquats,
les avions pourront désormais voler par relatif mauvais temps
ou même dans l'obscurité. La presse américaine,
toujours friande de héros, s'empare de la nouvelle et médiatise
James Doolittle qui n'a que 33 ans. En récompense de ses travaux,
notre homme reçoit le Harmon Trophy. Doolittle est bel et bien
reconnu comme étant un véritable pionnier de l'aviation.
En janvier 1930, James Doolittle est nommé
conseiller par l'armée pour la construction de l'aérodrome
Floyd Bennett de New-York. Le 15 février de la même année,
notre homme décide de quitter les forces armées et d'entamer
une carrière civile. Nommé major dans le Specialist
Reserve Corps, Doolittle rejoint la très puissante Shell Oil
Company où il occupe le poste de directeur du département
aéronautique et celui de vice-président. Il travaille
notamment sur la mise au point de carburants pour les avions. Cette
activité le conduit régulièrement à voler
afin de procéder à des tests et des évaluations.
Toujours passionné par les courses, le pilote remporte la Bendix
Trophy Race de Burbank à Cleveland. Il enlève
aussi la Thompson Trophy Race à
bord d'un Gee Bee R-1. Ces succès renforcent encore un peu
plus son image de pilote talentueux et aussi de héros. En avril
1934, "Jimmy" devient membre du bureau militaire chargé
de l'organisation de l'US Air Corps.
En 1940, Doolittle accède à la charge
de président de l'institut des sciences aéronautiques.
Alors que les armées du IIIe Reich déferlent sur les
nations européennes, le président Roosevelt et les Etats-Unis
commencent à envisager l'entrée en guerre. Le 1 juillet
1940, James Doolittle est rappelé au service actif et est chargé
d'évaluer les capacités de production d'appareils de
combat. Affecté dans l'Indiana puis dans le Michigan, il travaille
de concert avec les firmes automobiles. Il écume usines et
sites de production afin de prodiguer des conseils pour transformer
les chaînes de montage d'automobiles en ateliers aéronautiques.
Dès le mois d'août 1940, il s'envole pour la Grande-Bretagne
en mission spéciale d'observation afin de bénéficier
de l'expérience des constructeurs aéronautiques britanniques.
En décembre 1941, l'attaque de Pearl Harbor
fait basculer l'Amérique dans la guerre. Promu lieutenant-colonel
le 2 janvier 1942, James "Jimmy" Doolittle est convoqué
au quartier général de l'Army Air Force afin de planifier
le premier raid aérien au dessus du "sanctuaire national"
japonais. Militairement peu efficient, ce raid doit avant tout redonner
le moral à l'Amérique et prouver aux yeux du monde que
le Japon n'est pas intouchable. Doolittle se porte volontaire pour
mener à bien le raid. Il reçoit l'accord du général
H.H. Arnold et celui de l'amiral King. Le
18 avril 1942, seize bombardiers moyens B-25B, allégés
d'un maximum de leurs équipements, s'élancent l'un derrière
l'autre et décollent difficilement du pont du porte-avions
USS Hornet (CV-8) commandé par Mitscher. Les cibles ? Des sites
industriels nippons à Tokyo, Kobe, Osaka et Nagoya. Le vol
est sans retour, les équipages le savent, il devront, si tout
va bien, sauter en parachute au dessus de la Chine. Comme ses hommes,
Doolittle saute. Il atterrit près de Chu Chow dans une rizière
chinoise.
La nouvelle de l'attaque booste le moral américain
et celui des alliés. James Doolittle, promu général,
reçoit la médaille d'honneur des mains du président
Roosevelt. La cérémonie a lieu à la Maison Blanche.
James Doolittle est traité en héros national ! Il accumule
les décorations et est aussi récompensé par les
Anglais, les Français Libres, les Belges, les Polonais, les
Chinois, etc.
En juillet 1942, notre homme embarque pour le théâtre
d'opérations d'Europe-Afrique. Affecté à la 8th
Air Force, il devient le patron de la 12nd
Air Force en septembre 1942. Les escadrilles de Doolittle sont
engagées en Afrique du Nord contre les forces axistes. Sur
place, il retrouve un très vieil ami, californien comme lui,
le général George Smith Jr Patton. Il commande ensuite
la 15th Air Force de mars 1943 à
janvier 1944, avant de prendre la tête de la célèbre
"mighty" 8th Air Force qui
bombarde massivement, jours après jour, le territoire du IIIe
Reich. En 1945, alors que l'Allemagne nazie vient de capituler, Doolittle
et sa 8th Air Force partent pour le théâtre d'opérations
du Pacifique mais le Japon capitule à son tour.
Honoré par les Etats-Unis comme par l'ensemble
des nations alliées, "Jimmy" Doolittle quitte l'armée
en mai 1946 et retrouve son poste de vice-président à
la Shell Oil Company. Parallèlement, il fait partie du National
Advisory Committee for Aeronautics de 1948 à 1958 et du President's
Science Advisory Committee. Ce dernier organisme regroupe des conseillers
scientifiques rattachés à la Maison Blanche. Il part
à la retraite en 1959, toute en restant particulièrement
actif dans le domaine du développement de l'aviation, où
ses avis restent précieux et fort appréciés.
Il est aussi membre de plusieurs conseils consultatifs fédéraux
traitant principalement de la sécurité national américaine.
Honoré une dernière fois par le président
Ronald Reagan en 1985, James Doolittle s'éteint le 27 septembre
1993, à l'âge de 96 ans, à son domicile de Pebble
Beach (Santa Monica) en Californie. Il laisse derrière lui
ses deux fils, James H. Jr et John P, tous deux officiers de l'US
Air Force. Le général Doolittle est inhumé au
cimetière national d'Arlington, où il repose au côté
de son épouse, Josephine Doolittle née Daniels (1895-1988).
L'extraordinaire carrière de "Jimmy" Doolittle est
racontée dans l'ouvrage de Quentin Reynolds, "The Amazing
Mr. Doolittle". Un film, "Thirty Seconds Over Tokyo",
est aussi consacré au héros du "Tokyo Raid"
ainsi qu'au raid lui-même.