Texte original : http://www.ordredelaliberation.fr/fr_compagnon/988.html
Issu d'une famille tourangelle, Jean Tulasne est né le 27
novembre 1912 à Nancy où son père, officier de
cavalerie passé dans l'aviation en 1915, était en garnison.
Il fait ses études secondaires au Prytanée de la Flèche
et entre à Saint-Cyr en 1931 (promotion Tafilalet). Sorti en
1933 avec les galons de sous-lieutenant, il passe ensuite deux ans
à l'Ecole de l'Air de Versailles avant d'être versé
dans la 15e Escadre de Bombardement à Avord. Souhaitant intégrer
une unité de chasse, il demande sa mutation qui intervient
en avril 1937 ; il est alors affecté à la 3e Escadre
de Chasse à Dijon. En octobre 1938, il est envoyé comme
instructeur à l'Ecole de l'Air de Salon-de-Provence.
En mai 1939, Jean Tulasne est affecté en Tunisie à
l'Escadrille Régionale de Chasse 574
de Tunis-El Aouina et, en juin, est nommé capitaine. En septembre,
son escadrille est transférée à Oran et intégrée
au GC II/9 ; il prend alors le commandement
de la 4e Escadrille. Il passe ensuite au GC
I/7 et prend le commandement de la 2e Escadrille. En janvier 1940,
il est rapatrié en France avec son Groupe de Chasse pour trois
semaines au terme desquelles il est envoyé au camp de Rayack
au Liban dans le cadre des Forces aériennes de Groupement mobile
du Levant. Transféré en mai 1940 sur un terrain de la
plaine de la Bekaa avec son unité, le capitaine Tulasne brûle
d'envie de participer au conflit qui fait rage en France mais l'armistice
intervient avant son transfert en métropole.
Rendu responsable de la désertion de trois de ses camarades
(le lieutenant Péronne et
les sous-officiers Coudray et Ballatore),
partis fin juin rejoindre les Forces françaises libres, Jean
Tulasne est d'abord interdit de vol puis autorisé à
voler de nouveau mais sous surveillance uniquement. Le 5 décembre
1940, au cours d'une sortie au large de Beyrouth, il simule une panne
de moteur, tombe en piqué et, au ras des vagues, met le cap
vers la Palestine. Il se pose à Lydda près de Haïffa
où il retrouve ses anciens camarades incorporés au Free
French Flight n° 2 et est dirigé vers le Q.G. britannique
à Jérusalem avec l'officier de liaison des FFL en Palestine.
Pour les autorités de Vichy, le capitaine Tulasne est officiellement
porté "disparu en mer" et a même les honneurs
d'un requiem solennel dans la cathédrale de Beyrouth.
En Palestine il obtient d'être incorporé dans un squadron
de chasse qui doit participer prochainement à des opérations
sur le front de Libye. Il s'engage le 9 décembre dans la RAF
avec le grade de Flight Lieutenant et passe deux semaines à
Ismailia pour parfaire son entraînement. Noté comme "pilote
exceptionnel", il rejoint à la mi-janvier 1941 le 274
Squadron qui se bat contre les Italiens dans la région
de Tobrouk. Fin février 1941, il est promu commandant et nommé
par le général de Gaulle Chef d'Etat-major des Forces
aériennes françaises libres
(FAFL) au Moyen-Orient en remplacement
du colonel de Marmier ; il doit alors partir s'installer au Caire,
quittant le front a contrecur.
Le 15 septembre 1941 est créé le Groupe
de Chasse "Alsace" immédiatement placé
sous les ordres du commandant Tulasne qui laisse l'Etat-major au colonel
Astier de Villatte.
Après plusieurs mois de préparation et d'entraînement,
le Groupe de Chasse "Alsace"
part pour l'Egypte en janvier 1942 assister la 8ème Armée
Britannique au cours de la bataille de Gazala. Tulasne participe à
l'action jusqu'au 15 juin effectuant 16 missions de guerre pour 20
heures de vol avant de recevoir l'ordre de se replier avec son groupe
devant l'avancée des troupes de Rommel. Affecté à
la couverture d'Alexandrie avec son unité, il se voit confier
le commandement tactique d'un nouveau groupe de chasse destiné
à se battre sur le front russe : le Groupe
de Chasse " Normandie". Rappelé en Angleterre,
il attend impatiemment le départ du groupe pour l'Union Soviétique.
Enfin, le 1er décembre 1942, les volontaires français
parviennent sur le sol russe, après un voyage de trois semaines.
Après quatre mois d'instruction et de formation des pilotes,
le GC "Normandie"
est opérationnel. Il est équipé d'appareils soviétiques
: les Yak. En avril 1943 ont lieu les premières sorties du
groupe et les premières victoires. Jean Tulasne effectue deux
à trois sorties par jour, escortant des bombardiers, accomplissant
des couvertures ou des missions de chasse libre. Le 23 juin 1943,
il abat un FW 190 ; début juillet, la grande offensive russe
se prépare dans la région d'Orel et le "Normandie"
est inclus dans le plan d'attaque. Le 15 et le 16 juillet, Jean Tulasne
abat consécutivement deux avions ennemis.
Le 17 juillet en fin d'après-midi dans la région d'Orel,
au cours d'un nouveau combat aérien contre des FW 190, le commandant
Jean Tulasne disparaît en vol. Il a accompli dans sa carrière
près de 2 000 heures de vol et rempli 96 missions de guerre
en 132 heures de vol.